Compenser ses émissions de carbone.
À un moment donné dans notre vie de consommateur, par acquis de conscience, par envie de contribuer ou simplement par curiosité, on découvre la jungle des tractations vertes…
La bonne intention.
D’une manière générale, j’ai drastiquement réduit mes émissions de carbone. Ayant la chance de vivre à 30 mètres de mon lieu de travail, je n’ai plus de voiture depuis plusieurs années. J’utilise les transports publics, Je mange peu de viande et beaucoup de légumes, de manière aussi locale que possible (À Lausanne le panier à deux roues joue dans la catégorie « puristes »).
Pour le chauffage, je n’y peux pas grand-chose puisque je suis locataire. Et comme nos petites voisines ont presque toutes passé 80 ans, elles bougent moins, se refroidissent et mettent le chauffage à fond. On vit presque en tee-shirt toute l’année sans ouvrir les vannes.
Reste l’avion. J’ai circoncis au strict minimum mes déplacements aériens. Soit 3 vols simples européens par année. Vous attendez peut-être que je justifie le fait de rendre visite à mes parents en Bretagne chaque été parce que mon sujet impliquerait une attitude exemplaire mais non. Je change mes habitudes dans la limite du confort ressenti. C’est un parti pris assumé (et dès que le train de nuit sera rétabli, je suis preneuse)
Néanmoins, au moment de payer le billet, je réalise qu’il est bien en dessous du budget que j’avais prévu. Ça coûte moins cher d’aller en Bretagne ou à Malte en avion que de voyager de Lausanne à Grimentz en train et bus. Et ça, ce n’est pas juste. Ça ne reflète pas le coût des installations aéroportuaires, du kérosène, du personnel de bord et du personnel technique au sol. Encore moins l’impact sur la planète. Bref, Ça cloche.
Quand ça cloche, je cherche davantage à rééquilibrer qu’à resquiller en me réjouissant d’économiser sur le dos de la planète. C’est donc là que m’est venue l’idée de consacrer mon budget excédentaire à la compensation de tout ou partie de mes émission de carbone liées à ces trajets en avion.
Première étape : calculer son bilan carbone. Ça c’est facile.
https://calculator.carbonfootprint.com/calculator.aspx?lang=fr&tab=3
Pour voyager de Genève à Nantes, c’est 0,17 tonnes de CO2
Sur my climate, la conclusion est très proche https://co2.myclimate.org/fr/flight_calculators/new
Chaque site propose de compenser en plantant des arbres localement ou ailleurs dans le monde.
Je me fends d’un avertissement qui a toute son importance.
Parler de la compensation carbone, c’est mettre le doigt dans le monde effrayant de la tractation de la bonne conscience. Ça m’avait déjà choqué lorsque j’avais fait la tournée des banquiers pour m’enquérir des placements verts
NB : si le jargon actions/fond de placement sonne exotique à vos oreilles néophytes, découvrez la formation « Investir sans frémir », une introduction pour grand.e débutant.e à la finance durable.
Ça me rappelle la maxime de Gunter Pauli.
« Mal c’est mal,
Moins mal, c’est toujours mal;
Il faut faire les choses Bien. »
À mon avis, la compensation des émissions de carbone par les grandes entreprises n’est pas une stratégie long terme. C’est pourtant la marotte d’un nombre croissant de gros acteurs économiques. C’est à qui annoncera les plus gros chiffres : Air France s’est engagé à planter 70 millions d’arbres ; la Fondation Yves Rocher indique 100 millions ; Total promet 310 millions…
Quand Easyjet se proclame « première compagnie neutre en carbone au monde », je tique et j’ouvre les guillemets. La neutralité carbone serait un changement de modèle radical. La facilité de ces annonces, la vague de « carbone magique » éveille surtout ma suspicion.
L’objet de ce billet de blog concerne des petites démarches individuelles, et doit s’accompagner d’une démarche de fond concernant la limitation spontanée des émissions de carbone (dans les grandes lignes : la voiture individuelle, le chauffage et l’origine de la nourriture).
Quand on cherche à compenser ses émissions de carbone, on rencontre très facilement des organisations qui se proposent de le faire pour nous. Mais il y plusieurs hics possibles.
Parfois les arbres qui sont plantés ne sont pas natifs ni utiles à la diversité. Pour ma part, je me refuse à planter de la palme africaine pour compenser mon billet d’avion.
Pour ne citer qu’un exemple, le label FSC, pionner en la matière a longtemps replanté des palmeraies à la place de forêts primaires sans « trahir » son mandat de base : un arbre coupé, un arbre planté.
Il y a aussi les campagnes de plantation massives, très impressionnantes. En Turquie, le 11 novembre 2019 a été décrété jour de “reforestation nationale” par le président Erdogan : 11 millions de sapins ont été plantés ce jour-là à travers le pays. Moins de trois mois plus tard, près de 90 % des arbres plantés seraient déjà morts, victimes du manque d’eau, selon le Syndicat de l’agriculture et des forêts : “les responsables du projet n’ont pas voulu écouter les mises en garde des experts ; leur seule préoccupation était de battre un record”…
Quand on scanne l’ensemble de ces projets de grande envergure, on note que ce n’est pas systématiquement la faute des planteurs. Les conditions climatiques changent déjà et les arbres ont du mal à s’adapter à la vitesse de ces évolutions.
Il n’y a pas de encore de « gendarme de la neutralité carbone ». Un arbre ne pousse pas instantanément et la capture effective de CO2 prendra 30, 50, 100 ans. J’y vois un problème fondamental d’ « accountability » : ceux qui prennent des engagements aujourd’hui sur la compensation de mes émissions de carbone ne seront plus en poste dans 10, 20 ou 30 ans pour justifier du résultat de ma contribution.
« Le meilleur moment pour planter un arbre était il y a 20 ans. Le deuxième meilleur moment est maintenant »
Dans l’absolu, l’arbre qui compense votre trajet d’aujourd’hui a été planté il y a 20 ans.
Dans l’absolu, le meilleur moyen de planter un arbre, c’est de cesser de cultiver. Passées les étapes de la succession écologique, la forêt reprend ses droits, et en l‘espace d’une trentaine d’années, vous aurez une forêt et de beaux arbres.
N’importe quel agriculteur criera au loup en disant qu’il faut bien qu’on mange, ce qui est très juste. Alors le modèle le plus inspirant, une forêt comestible, demande l’intervention de l’homme. C’est le Graal du modèle permaculturel, qui a inspiré le paysage d’abondance ultime dans la méthodologie Blooming Companies.
Voici quelques images d’une forêt nourricière.
Et pour faire connaitre ce t type de projet, on peut soutenir le documentaire sur ulule.
Dans l’absolu, c’est à ce type de projet que j’aimerais contribuer.
Mais comme on ne vit pas dans l’absolu mais ici et maintenant, cherchons ce qui s’en rapproche le plus.
J’ai donc cherché des petites associations locales qui plantent des arbres.
Fruitiers tant qu’à faire (Qui sait, en cas de problème d’approvisionnement, on sera contents d’avoir quelques pommes à croquer).
Le projet de la fondation Opaline nommé Terre de liens qui consiste à créer des Vergers communautaires va dans ce sens et m’intéresse beaucoup. C’est à Bex et je pourrai aller m’y balader.
Je vais poursuivre mes recherches dans ce sens.
Et vous ? Envisagez-vous de compenser les émissions de carbone liées à vos déplacements ?
50% Complete
Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit, sed do eiusmod tempor incididunt ut labore et dolore magna aliqua.